C'est le grand truc des voyageurs dans cette région que de faire de
l'Off road. Nous on savoure tellement ces routes magnifiques, qui
ressemblent à des récompenses après l'Asie centrale, qu'on n'a pas
très envie de s'en éloigner.
Mais à notre manière nous aimons sortir des sentiers battus et vivre
des expériences insolites et authentiques. Vous le savez nous ne
reculons devant rien, et après notamment le camping en Sibérie, la
natation au Kirghiztan, l'entrée au Turkménistan sans moteur, le
séjour prolongé dans un garage de Téhéran, le bronzage à Ormuz, nous
allons vous raconter notre semaine de villégiature à Qatbit (ou
Qitbit) dans le désert omanais.
Nous avons prévu deux séjours à Oman. Puisque nous avons le temps,
nous visitons dans un premier temps le sud, à la frontière du Yémen,
puis nous reviendrons dans le nord aux environs de Mascat un peu plus
tard. Je sais, nous sommes vraiment de gros veinards. Enfin... Si l'on
veut.
La frontière omanaise est très facile à franchir depuis Al Ain. En
deux formulaires trois taxes, nous nous retrouvons dans le désert, que
nous avons prévu de traverser en deux jours. C'est beau mais...
Désert. Et un peu monotone. Parfois on croise des dromadaires
heureusement. Et des forages pétroliers.
Dans l'apres-midi un voyant s'est allumé sur le tableau de bord.
Bon... On le connait celui-là, ça a un rapport avec notre filtre à
gazoil qu'on doit changer depuis... quelques mois. On s'arrête le soir
un peu en retrait de la route. Le ciel étoilé est grandiose et le vent
effrayant.
Le lendemain nous reprenons la route, prêts pour les plages de rêve où
nous allons atterrir le soir. Le fameux voyant se réallume. Bon... On
garde espoir. Jusqu'à ce que, 300 kms avant Salalah et notre bivouac
de rêve, notre filtre à gazoil explose. Le désert résonne encore de
nos hurlements de rage. Heureusement nous ne sommes pas Toqués pour
rien et agissons vite et reprenons vite (un peu) la direction des
choses. D'abord se faire tracter jusqu'à la station service qui,
heureusement, n'etait que 20 kms avant. Et quand on sait que c'ést la
seule à 200kms à la ronde, on mesure sa chance. Ensuite demander à
notre sauveur de Al Ain d'essayer de nous trouver les pièces
nécessaires dans la péninsule arabique (apres évidemment avoir tenté
des réparations de l'ultime absolue derniere chance) Puis finalement
se faire envoyer les pièces à Salalah (300kms) par super jolie maman
qui a menacé Fiat de tous les maux pour dégotter les précieux trucs
mécaniques et qu'on va maintenant surnommer Mamie DHL. Puis organiser
le quotidien et l'attente à Qitbit qui signifie sans doute quelque
chose comme "trou du Q du monde" en arabe. Heureusement que
l'experience fait qu'on n'entre jamais dans un nouveau pays sans le
plein de vivres, heureusement qu'on avait changé un peu d'argent à la
frontiere. Et heureusement que nous ne sommes pas seuls ici.
En fait Qitbit est une oasis- Aire de repos. Donc on y trouve en plus
de la station service, un petit restau, une petite epicerie, un hôtel,
pas mal d'arbres et beaucoup de sable. Les employés, tous indiens ou
pakistanais, vivent ici ainsi que les ouvriers des routes qui
s'entassent dans des préfabriqués. Le tout est entouré d'un mur et
après le mur : rien de rien.
Que fait-on entre quatre murs à Qatbit ? On prend le temps de ne rien
faire. On goûte toutes les specialités du coin (les moins chères
puisqu'on n'a que quatre sous en poche), on bavarde avec les locaux
(indiens) et les passants (omanais) et on découvre ainsi le pays, on
travaille, on range, on chante, on lit, on regarde des films, on joue.
Les enfants qui trouvent leur bonheur partout ont construit leur
87693827403ème cabane, jouent au puzzle géant sur la croûte craquante
du désert, nourrissent la chèvre du pompiste et révisent les règles du
cricket. Nous découvrons les vents du désert, chauds et douloureux,
pleins de sable. Nous étudions ces physiques magnifiques des habitants
du pays, des indiens aux omanais, aux coiffes diverses, à la peau
noire et au costume si blanc. Xtophe a rangé tous les placards, il bat
aussi des records à Angry Bird, Rachel a coiffé ses poupées, j'ai
recoupé ma frange, j'envisage de vernir mes ongles et j'essaie de
faire durer un roman deux jours, Ulysse écrit des poemes face au
désert et sculpte des épées, Gaspard a bon espoir de perdre ici sa
première dent de lait et Léon a le nez qui coule pour la première fois
depuis 7 mois, fichu soleil !
Si vous lisez ce message c'est que Xtophe et Ulysse ont trouvé le
moyen d'arriver à Salalah (meikum comme dit Gaspard) et que si tout va
bien ils rentreront ce soir avec notre nouveau filtre, MacGyver
réussira à le remonter sans la durite idoine (aux dimensions non
DHLables), et que nous partirons, poursuivre notre séjour omanais sous
les cocotiers.
A moins que...
Mais vous vous doutez qu'on a déjà élaboré de nouveaux plans de
secours, et qu'après le plan Z ter de l'alphabet latin et tout le
cyrillique, nous avons encore l'arabe. Rien n'arrête les Toqués.
Encore une fois, Inch Allah...