lundi 19 mars 2012

Carpe diem à Ibri

Le monde des voyageurs est un petit monde. Il y a 4 ans, dans un article de magazine, Xtophe avait lu qu'il y avait 15000 bateaux, 10000 backpackers et 1000 véhicules en voyage autour du monde.
Tout ceci pour dire que forcément, les échanges de mails et blogs aidant, on finit par connaître un bon nombre de ces familles. Et c'est grâce à ces technologies modernes que nous avons rencontré la famille Muller. Ils ont un peu d'avance sur nous dans leur itinéraire, parce qu'ils ont dû improviser face à des coups du sort administratifs, ils ont deux filles de plus que nous, trois garçons de moins et un véhicule, le Carpe diem, dans lequel notre Toqcar pourrait entrer tout entier (on y pensera lors de la prochaine avarie).
Nous nous sommes arrangés pour nous donner rendez-vous dans le Nord d'Oman, à Ibri.
Ils se sont chargés de la boisson interdite mais trouvable aux Emirats, nous nous sommes chargés... de la gente masculine. Ils sont arrivés tout beaux tout propres, nous sommes arrivés euh... tout Toqués. Evidemment les enfants se sont très bien entendus, la couchette de Rachel a été prise d'assaut par une horde de minettes, pour son plus grand plaisir. Gaspard a trouvé une assistante pour ses travaux pharaoniques au pied du fort d'Ibri, il a aussi passé des heures sur le vélo des filles. Evidemment les parents se sont très bien entendus et nous avons refait le monde, rigolé à n'en plus pouvoir en nous racontant nos mésaventures de voyage, rêvé à des lendemains qui chantent jusqu'à réaliser que le lendemain était déjà arrivé que le muezzin allait bientôt chanter (pour le plus grand plaisir de Marine) et donc que le jour allait bientôt se lever.
Le lendemain nous avons donc lutté ensemble contre le manque de sommeil, l'excès de soleil et la gentillesse des habitants du quartier qui se sont lancés dans un grand concours : à qui nous apporterait le plus de nourriture. Crêpes, gâteaux, biscuits, bonbons, café, dattes (au cumin ou confites ou nature), oranges, bananes, pommes, raisin, pastèque, riz, poulet, eau, le tout dans des quantités telles que nous ne savions plus où les ranger, nous ont été apportés ou même ont été déposés sur notre table sans que nous ne nous en apercevions. Un défilé surréaliste... pour des équipages surréalistes aussi sans doute.
Mais il a fallu nous séparer, tout en prévoyant de nous retrouver dans quelques temps. Les occupants du Carpe diem sont partis à Muscate chercher leur visa pour l'Arabie saoudite (Inch Allah) et nous sommes revenus faire une halte reposante (et un grand ménage de printemps) aux Emirats, à Al Ain chez notre cher Bernard, avant de retourner à Dubai où nous avons d'autres rendez-vous importants.
 Léon, Cassandre, Roxane, Victoria, Gaspard, Rachel et Ulysse


PS : les photos d'Oman sont en ligne ici

mardi 13 mars 2012

Sur la plage abandonnés coquillages et Toqués



Lors d'un voyage au long cours, on connait différentes périodes, et
elles sont toutes nécessaires. Le rythme est globalement intense,
rares sont les journées sans surprises, nouveautés ou mésaventures.
Mais on a aussi besoin de moments de repos, de s'installer quelques
semaines dans une routine, de jeter l'ancre. C'est ce que nous avons
fait près de Mirbat, sur la côté sauvage de Hinu.
Installés au bord de l'eau, nous vivons au rythme du soleil et des
marées. Ce lieu est incroyable. En plus de tous les poissons au milieu
desquels nous nageons, en plus des crabes et des coquillages nous
avons eu droit à des spectacles fabuleux.
Une après-midi, alors que nous lisions face à la mer, Ulysse et moi
avons pu tout simplement regarder une baleine passer au large. Quelle
émotion et quelle surprise...
Hier ce sont des tortues qui sont venues pêcher devant notre plage.
Xtophe et Ulysse ont également vu un petit requin traverser la baie.
Nous avons bien tenté de quitter notre coin de paradis pour visiter
les environs. Poussés par la nécessité, au bout de quelques jours,
nous sommes allés en ville chercher vivres et eau. Nous avons aussi
pris notre air le plus civilisé possible, avons coiffé nos cheveux,
enfilé des vêtements (merci aux amies fournisseuses de la garde-robe
de nos enfants, grâce à vous nos sauvages font parfois illusion avec
leurs vêtements chics) et sommes allés passer la journée au Mariott.
Oui messieurs dames, être Toqué c'est savoir passer de la vie de
Robinson à celle de pacha. L'intérêt de cette opération est
multiple : les enfants profitent des piscines et ont l'impression de
passer la journée dans un parc d'attraction, les parents profitent du
bar et ont l'impression de passer la journée dans un parc
d'attraction, et une fois que les mini Robinson ont été bien
désinfectés, toute la famille profite des vestiaires et des douches.
Gaspard en a même profité pour perdre sa première dent. Enfin, la
première avait été arrachée à Bangkok il y a 4 ans.
Mais finalement, après ce bain d'over-civilisation, nous n'avions tous
qu'une envie : retourner dans notre crique. Et c'est ce que nous avons
fait.
Demain nous repartons pour Salalah, dire au revoir à nos amis omanais,
puis nous remontons la route du désert vers les Émirats, doucement,
pour ne pas contrarier notre navire capricieux.
Nous n'aurons pas visité tout ce que nous avions prévu dans le Sud
d'Oman mais nous repartons charmés, reposés et bronzés. Toutefois, si
nous avons pu nous offrir le luxe de si peu explorer la région, c'est
que nous savons que nous revenons passer le mois d'avril dans le Nord
d'Oman.
Voyager au long cours c'est avoir le luxe du temps, pouvoir le prendre
et même le perdre un peu.

mardi 6 mars 2012

Histoires omanesques


Le Sud d'Oman est différent du reste du pays puisqu'il connait un
climat tropical et une mousson, l'été, qui couvre toute la région de
verdure et remplit les wadis. Nous ne pouvons qu'imaginer cette
verdure puisqu'à cette saison le désert reprend ses droits, mais nous
profitons pleinement de la côte sauvage et superbe. Dès notre premier
jour à Mughsayl, nous avons pu assister à la valse des dauphins, sans
parler de la multitude de poissons, coquillages et oiseaux qui peuplent
les plages. Dès le premier jour, les pêcheurs s'approchaient en
bateau pour nous lancer deux beaux poissons.
Évidemment le jeudi soir et le vendredi les plages les plus proches de
la ville de Salalah se couvrent de monde. Le bon côté ce sont les
rencontres, Ulysse a même appris le rugby à un groupe de jeunes
égyptiens. Le mauvais côté ce sont les quads et les 4x4 sur la
plage, et les ordures que tous laissent derrière eux ensuite. Comme
partout dans le monde...
Mais peu importe, la nature demeure sublime et malgré tout préservée
ici. Nous jouons les romanichels sur une crique de rêve, dérangés
seulement par le bruit des sternes et les visites des pêcheurs du coin
entre deux récoltes de coquillages, courses de crabes, diners au feu
de bois et couchers de soleil romantiques.
Ce matin un des pêcheurs a vu Xtophe (essayer de) pêcher, un moment
plus tard, (solidarité professionnelle oblige) il venait nous offrir 5
poissons tout frais. Ce qui ajouté aux... patates douces récoltées
au supermarché fait toujours un repas délicieux.
L'après-midi, à marée basse, ce sont les femmes qui travaillent
dans leurs "drôles de maillots de bain" comme dit Gaspard : dans le
Sud d'Oman les femmes sont totalement voilées, ne laissant apparaitre
que leurs yeux souvent, donc la tenue de bain est effectivement
spéciale, un entassement de couches de vêtements qui leur donne
finalement un petit air de clowns des mers. Ces femmes, armées d'un
masque et d'un crochet pêchent divers coquillages, dont les ormeaux.
Tout à l'heure, alors que je me baignais (ici comme nous sommes en
général seuls je peux, alléluia, me baigner en maillot de bain, sans
ma fameuse nuisette islamique, celle que je mets sur mes jeans en Iran
et sur mon maillot à la plage - merci Petit Bateau...) deux pêcheuses
de coquillages sont arrivées. Elles se sont assises dans l'eau avec
moi, on a fait les présentations. C'est pour ce genre de moments qu'on
voyage et qu'on aime notre mode de voyage. J'étais si bien là, avec
ces femmes si différentes de moi mais avec qui nous arrivons à
échanger un peu et à rire. Les enfants, autour, trouvent cela normal,
et ça aussi c'est magique. Puis, elles m'ont offert des coquillages
sortis de leurs besaces, me faisant signe de les manger. C'est
tellement sympa, c'est leur récolte, leur gagne-pain. Ça ne se refuse
pas. Il faut savoir que je n'ai jamais mangé de coquillages, beurk.
(mais les huitres avec un petit vin blanc chez Jéjé au Quintaou ça
oui !). Bref, mes enfants, morts de rire, ont vu les femmes m'ouvrir
ces coquillages, énormes pour certains, et me les tendre avec un grand
sourire. Et ces ingrats fruits de mes entrailles apeurées n'ont même
pas voulu m'aider, ils ont filé me laissant là, mangeant ces trucs à
l'allure franchement dégueue me consolant en me disant qu'au moins,
ils étaient frais. Et comme elles sont généreuses, elles m'en ont
resservi. Et sans mayo ni vin blanc pour les aider à passer.
Évidemment ça n'a pas loupé, mon système omanitaire n'est pas aussi
aventurier que moi et je me suis immédiatement retrouvée en crise
allergique. Asthme, démangeaisons, la totale.
Vous savez que nous sommes aguerris et équipés et j'ai donc pu me
soigner de suite, je vous rassure.
Ce matin nous plaisantions avec les enfants qui partaient jeter nos
poubelles (et celles des autres que nous ramassons au passage) dans
une benne située à l'autre bout de notre baie : "ne parlez pas aux
étrangers surtout!" ça les a bien fait rire.
Cet après-midi ils en ont conclu que ça m'apprendrait à accepter de
la nourriture de la part d’étrangères. N'empêche que ce qu'ils n'ont
pas réalisé c'est que la prochaine fois qu'on m'offrira des
mollusques tout juste arrachés à leur rocher, ils devront les manger
pour me sauver la vie. La vengeance de la mamoman est un plateau de
fruits de mer qui se mange cru.

jeudi 1 mars 2012

Nos déserts et nos camps


 (épisode mécanique numéro 278)
(ou le jour où j'ai appris la patience. Enfin, un peu...)

C'est quand même beau ce monde moderne qui nous permet de recevoir un
colis n'importe où en quelques jours ! Ulysse et Xtophe ont battu des
records de vitesse, dans tous les sens du terme (ceux qui ont conduit
en Arabie comprendront) lorsqu'ils sont allés récupérer notre nouveau
filtre à gasoil à 300 kms de notre camp de Qatbit. Depuis la Russie
il faut reconnaître qu'il est toujours aisé de faire le moindre trajet
en stop, petit ou grand, que ce soit en ville ou dans le désert, et ce
sont toujours des moments qui permettent des rencontres drôles
insolites ou intéressantes. Durant cette petite journée en ville, ils
ont ainsi entre autre reçu l'aide de Hashem, jeune omanais du coin qui
leur a fait promettre de le tenir au courant de la suite.
Dimanche soir, nous étions heureux à l'idée de pouvoir enfin
repartir lundi matin pour Salalah et cette partie d'Oman dont nous
rêvions tant.
Lundi matin, en un temps record aussi, notre mécano de choc a
installé le nouveau filtre et le Toqcar, après quelques hésitations,
a redémarré.
Nous avons fait le plein de gasoil, d'eau, avons dit au-revoir à tous
ceux qui nous entouraient depuis quelques jours et nous sommes lancés
vers le Sud. Mais 20 kms plus tard, de nouveau notre voyant s'est
allumé, le moteur était en totale perte de puissance, ne permettant
plus à son chauffeur, désolé, d'accélerer. Nous avons donc de
nouveau fait demi-tour. Nous voyant passer dans l'autre sens, tous les
ouvriers qui travaillent à la nouvelle route se sont interrogés et
ont même envoyé leur chef, anglophone, se renseigner à notre sujet.
Il ne s'agissait plus du filtre. Et ça ressemblait affreusement à ce
qui s'était produit en Iran. La cata...
Depuis le début de nos ennuis mécaniques nous avons le sentiment
qu'il y a un problème, que personne n'a su identifier, et qui est à
l'origine de toutes les autres pannes. Et c'est quasi toujours après
avoir fait le plein que les ennuis surgissent.
Xtophe s'est courageusement replongé dans le moteur, moi je n'avais
plus beaucoup de courage, il faut le dire. Nous nous sommes battus en
Iran pour avoir la chance de poursuivre le voyage et de visiter
notamment Oman et nous n'en aurions vu qu'une station service dans le
désert. Nous étions déjà en train d'élaborer nos énièmes
nouveaux plans pour les mois à venir, tout en commençant à organiser
un rapatriement vers les Emirats.
Xtophe m'a quand même rappelé qu'il faut être patient aussi. Parce
que nous l'avons éprouvé et un sage ami voyageur nous l'avait aussi
dit, en général, tout finit par se résoudre. Mais vraiment ce n'est
toujours pas mon fort.
Heureusement que mon ingénieuse moitié l'est plus que moi.
Heureusement que mes petits quarts gardent toujours le sourire et sont
toujours prêts à trouver merveilleux les changements de programme. Et
heureusement je me laisse toujours rapidement reprendre par leur et
mon optimisme de Toqués.
Xtophe s'est démené et le soir le Toqcar semblait fonctionner
normalement. Mais que faire ? Parce qu'il fonctionnait aussi
normalement le matin même.
Seuls, nous aurions sans doute fait demi-tour et sans doute
réorganisé la fin du voyage.
Mais d'abord un des chauffeurs de camion du chantier, qui vit sur
place comme tous les ouvriers du désert, un sikh à la coiffe fière,
s'est penché sur notre cas. Il ne parle pas anglais. En quelques
minutes, il a peut-être trouvé l'origine de tous nos soucis. Il a
immédiatement affirmé que c'est le
bouchon de notre réservoir de gasoil qui est bouché. Oui je sais, ça
parait dingue mais ça colle parfaitement... Il suffit de le changer et
en attendant de fermer le réservoir par un chiffon.
Mais nous ne savions toujours pas ce que nous devions faire :
poursuivre vers le Sud, sachant qu'en cas de souci on ne peut se faire
tracter jusqu'à Salalah à cause d'un col assez impressionnant,
repartir vers les Emirats mais... Et si nous tombions en panne dans le
désert encore ?
Et là, notre ami Hashem nous a offert la réponse. Tel le Petit Prince
(version moderne, sorti de son 4x4 américain) il avait tout simplement
décidé de venir nous voir à Qatbit, nous sachant dans la panade. Il
a juste fait 300kms pour nous soutenir, embarquant un ami dans sa
virée.
Discuter avec eux nous a fait le plus grand bien, nous avions besoin
d'amis et la décision est devenue évidente. Nous allions poursuivre
notre route comme prévu. Nous n’étions pas seuls en cas d'ennui.
Mardi, une semaine jour pour jour après avoir échoué à Qatbit, nous
tentions pour la troisième fois cette route sous les encouragements de
tous les ouvriers et chauffeurs du coin.
Je ne vous dis pas la tension à l'avant du camping-car... Mais nous
avons roulé comme si de rien n'était. Et avons pu rejoindre Salalah
et sa côte superbe et sauvage. Et nous sommes sous les cocotiers,
devant les oiseaux innombrables, les dauphins, les poissons en tous
genres, notre ami Hashem joue les guides et nous fait découvrir son
pays et sa culture, nous commençons à nous détendre sérieusement.
Nous avons quitté notre coin de paradis pour venir relever nos mails
et surtout découvrir la bouille de notre nouveau neveu Jonas, mais
nous y repartons vite.
Alors pour les photos et autres récits sur Oman, qui est vraiment
magnifique, vous patienterez un peu. Je vous promets, ça paye
toujours...



Thérèse