Un mois en Mongolie c'est long et c'est court. A voyager comme nous le faisons nous devenons difficiles, à quelques jours de la fin de notre séjour, nous avons l'impression que c'est fini. Le fait de sortir du pays, qui plus est par la même route que celle que nous avons empruntée à l'aller ne fait qu'accentuer cette impression. Alors vite nous nos dépêchons d'acheter les derniers produits mongols qui nous manquent (un de leurs thermos magiques, des bottes, des chaussettes chaudes...), et vient l'heure des bilans.
Vous l'avez sans doute compris nous avons adoré ce pays. Pour nous, en tant que voyageurs, il est comparable à l'Inde en ce qu'il a gardé son authenticité, sa culture, sa particularité. En ce qu'il nous échappe souvent et nous subjugue. Les paysages sont grandioses, la culture étonnante, les costumes et les gens sont beaux, leur culture et leur vie étranges et mystérieuses.
Nous avons apprécié l'accueil mongol et cette tradition qui veut que n'importe qui puisse entrer dans la yourte (on ne frappe jamais) et aura toujours à boire et à manger. Nous avons pu profiter du sourire et de l'humour mongol, surtout dans les situations difficiles : hier bloqués sur la route, sous la neige, des voitures, des bus, des camions en travers de la route, dans le fossé, tout le monde les pieds dans la neige, poussant les véhicules, pelletant, cassant la glace, et pas une personne pour râler, tous un grand sourire sur le visage, rigolant, s'encourageant. Il faut dire que leur vie est vraiment rude et qu'il vaut mieux savoir affronter les obstacles avec le sourire. Nous avons aimé recevoir la visite de nos voisins dans les steppes, leur offrir aussi à boire et à manger (je pense qu'ils ont parfois trouvé ça vraiment mauvais et nous avons bien ri le jour où nous avons vu un petit garçon mettre dans sa poche un de nos biscuits, comme le font nos enfants avec leur fromage !), chanter avec eux, parce qu'ils adorent ça, et parler ensemble sans rien comprendre de ce que nous disions les uns ou les autres. Nous avons été gâtés, on nous a fait des cadeaux, les vendeuses se sont mises en 4 pour trouver des pantalons pour les enfants (parce que le jean mongol... ça déchire !), tout le marché s'en est mêlé et a vidé ses stocks ; un chauffeur de voiture de touristes, rencontré à Karkorin et à qui nous avions dit que nous voulions des osselets, est venu nous en offrir quelques jours plus tard sur notre parking à Oulan Bator, Léon a été embrassé par tous ceux que nous avons croisé mais je vous rassure : il conserve son côté russe et ne leur a pas souri, le chameau. Nous avons vécu de très bons moments, et certains inoubliables.
Nous avons également découvert la vie de nomades, la vraie, et c'est impressionnant : une yourte est démontée en une heure, certains membres de la famille (souvent les enfants) partent avec les troupeaux, et les autres mettent la yourte sur une camionnette et c'est parti pour de nouveaux pâturages ! C'est d'ailleurs en ce moment que beaucoup de familles font leur transhumance, nous les croisons sur les routes, nous voyons aussi que certaines familles que nous avons rencontrées en venant ne sont plus là. La yourte est aussi un endroit magique. La "ger" dit-on en mongol. Elle est toujours impeccablement tenue, on n'y rentre que par la gauche et nous, les invités, sommes toujours installés à gauche. On y rentre sans arme, sans cravache. On ne jette aucun déchet dans le feu, qui est sacré. Tout est codifié, pour manger on baisse ses manches sur ses bras, on prend les aliments qu'on vous tend d'une certaine manière, on boit tous dans le même bol qu'on se fait passer (miam)...
Nous avons moins apprécié la face sombre des mongols qui est leur "violence culturelle". Ce sont des guerriers. Ils sont toujours, malgré leur sourire, dans l'affrontement, dans la course, dans la lutte : les mongols aiment se battre et comparer leur force, ils aiment la course que ce soit à cheval ou en voiture, ils ont cette démarche fière et particulière et ces bergers sont de vrais coqs. Ce serait sans importance s'il n'y avait l'alcool, véritable fléau dans le pays. Les mongols ont toujours bu de l'airag, mais leur boisson à base de lait de jument fermenté est très peu alcoolisée. Depuis quelques années ils boivent de la vodka, beaucoup beaucoup de vodka, et forcément avec l'alcool, le guerrier devient stupide et violent. C'est une réalité dont nous n'avons pas fait les frais puisque nous sommes prudents : nous ne buvons jamais avec les mongols, nous ne vivons de toute manière pas le soir, nous choisissons notre bivouac encore plus minutieusement le samedi soir, Xtophe ne rentre jamais dans leur jeu (on se bat ? on fait la course ? Voyons si tu peux casser ce morceau de bois avec tes doigts ?) et nous avons réussi à éconduire gentiment ou fermement les quelques mongols qui devenaient un peu agressifs. Mais c'est triste. Et inquiétant pour l'avenir.
A la fois la vie en Mongolie est rude. Nous avons juste eu un aperçu du froid et ça nous suffit à imaginer l'hiver. La nature est aride et sans pitié. La vie des femmes notamment est très dure (oh quelle surprise me direz-vous !), elles font tourner la yourte, entretiennent le feu, font les dizaines de traite de tous les animaux, cuisinent le fromage, l'airag, font sécher la viande (sous le lit), vont chercher l'eau, coupent le bois et évidemment s'occupent des enfants. Pendant ce temps les hommes s'occupent des troupeaux. Donc ils les regardent avec leur longue-vue, parcourent la steppe à cheval ou moto pour vérifier si les troupeaux vont bien, et le soir ils les ramènent autour de la yourte. Ce qui leur laisse largement le temps de... boire. J'exagère un peu, mais à peine.
Et pourtant, malgré l'étrangeté de ce pays incroyable, malgré l'obstacle de la langue (et une fois de plus mon russe m'a bien aidée, c'est la seule langue étrangère qu'on a l'espoir de pouvoir parler ici) nous avons trouvé qu'il était très facile d'y voyager et si nous avions pu y entrer plus tôt nous y serions restés un mois de plus. C'est un pays merveilleux pour les adultes comme pour les enfants, Rachel l'a d'ailleurs hissé sur la première place du podium de ses pays préférés.
Nous pensons la culture mongole assez forte (si vous le pouvez, regardez un peu jusqu'où s'étendait l'empire mongol du temps de Genghis Kan) pour résister à l'occidentalisation mais surtout à l'invasion chinoise. Si vous avez envie d'un voyage incroyable, nous vous conseillons vraiment de tenter l'expérience mongole.
Pour l'heure nous sommes à Darkan, la météo nous a contraints à passer la nuit en ville, sur le parking d'un hôtel. Si la neige nous le permet, nous partons profitons de nos derniers jours dans les steppes avant de passer la frontière russe le 2 octobre.