mardi 26 juillet 2011

Les Toqués autour de la Baltique


En Finlande nous avons pu vivre de trèèèès longues journées, même si
le soleil de minuit, ce n'est quand même pas le grand jour, mais c'est
un peu troublant cette luminosité qui n'en finit pas. Je ne peux pas
vous parler de ce pays dont nous avons simplement traversé un tout
petit morceau, le long de la Baltique, mais nous avons pu nous remplir
les yeux des paysages qui correspondaient exactement à ce que nous
imaginions : les maisons rouges en bois, la côte sauvage, très
découpée, les îles partout, et la nature foisonnante.
Le 24 juillet nous nous sommes installés dans un fjord et entre deux
constructions de cabanes et élaboration des règles de leur nouveau
clan, les enfants ont aidé Xtophe à pêcher notre dîner d'anniversaire
de mariage. Tandis que nous prenions notre apéro en amoureux (ou
presque... à 4 détails près), un grand-père finlandais est venu
bavarder avec nous et partager nos bretzels. Il a ensuite proposé
d'emmener Xtophe et les garçons chercher quelque chose à manger, et vu
son anglais nous ne savions pas quoi. Ils sont donc partis dans son
gros 4x4 et sont revenus avec un seau plein de myrtilles délicieuses.
Le lendemain ce même grand-père jazzman, propriétaire d'un magasin de
musique à Kotka et musicien est venu insister pour que nous venions
profiter de sa piscine, à 2 pas de là. Nous y sommes allés, il était
très heureux et nous a remerciés (!), il nous a fait visiter sa maison
dans les bois (paysages de rêve mais la présence des motoneiges et des
traineaux à côté des bateaux nous rappelle que l'hiver dure de longs
mois et est très rude) et nous avons pu voir notre premier sauna (il y
a plus de saunas que de foyers en Finlande). Il voulait même que nous
restions le soir parce que 10 musiciens le rejoignaient pour jouer et
qu'ils allaient griller du poisson. Nous avons préféré refuser puisque
nous avions un peu l'inquiétude du passage de la frontière russe.
C'est idiot mais nous étions tous émus de cette rencontre, parce que
c'est la première de ce type durant cette nouvelle odyssée et que nous
savons que nous en vivrons sans doute beaucoup d'autres et c'est ce
que tous les voyageurs préfèrent évidemment.
Nous sommes donc arrivés à la frontière à 15h. Peu de voitures devant
nous, encourageant. Tout d'abord on fait la queue, en voiture, devant
des feux. Toutes les 20 minutes environ, le feu passe au vert et là il
faut tracer, car il repasse très vite au rouge. On se gare un peu plus
loin devant la douane finlandaise et tout le monde sort de sa voiture
en courant pour une vérification des passeports. Puis quand tout le
monde a terminé et est remonté en voiture, on repart tous ensemble et
c'est la course de nouveau puisque le noman's land avant la Russie
dure des kilomètres, au point que nous nous sommes demandé (quelle
innocence...) si nous n'étions pas simplement déjà en Russie.  Mais
non, il faut de nouveau faire la queue en voiture, mais là premier
problème pour nous : les files pour voitures avaient une limite de
hauteur de 3,1m, nous sommes plus grands. Nous nous mettons dans la
file des bus, et là la douanière qui s'occupe seule de toutes ces
files de voitures arrive en criant. Comme je suis très forte en russe
j'ai compris qu'elle n'était pas contente. On a du mal à lui faire
comprendre notre problème (malgré mon super niveau de russe), un
voisin de voiture finlandais sort même son Mètre pour mesurer le
Toqcar et lui expliquer la situation. Finalement elle comprend et nous
demande de laisser le c car garé là, au milieu de toutes les voitures,
et d'aller faire les formalités à pieds. Elle nous accompagne même, et
nous fournit les 12 formulaires à remplir.
On s'y colle, ceux-là ne présentent aucune difficulté, si ce n'est
celle de la taille de notre équipage, les moussaillons qu'on a dû
réveiller de leur sieste pour l'occasion et l'heure du goûter qui
approche.
Ensuite nous remontons dans notre camping-car, tout contents de nous.
Mais notre camarade-douanière revient en hurlant "Niet niet niet, vous
n'avez pas compris !" (trop fière j'ai compris justement) mais
effectivement on n'avait rien compris. Elle nous accompagne alors à un
autre guichet, pour le véhicule. On y repart tous parce que le
problème à la douane, c'est qu'on n'est jamais trop de 2 pour
comprendre ce qui se passe, donc 2=6 chez les Toqués. On fait la queue
gentiment, on révise le document traduit qu'on a pu obtenir par
d'autres voyageurs, tout fiers de notre ruse et de notre prévoyance.
Toqués mais rusés qu'est-ce que vous croyez ! Notre camarade douanière
revient même nous apporter les documents dans la file d'attente afin
qu'on les remplisse (en double of course). Et là... angoisse. Un
document entier à remplir en Russe, uniquement, et pas du tout celui
qu'on pensait, avec de longues questions auxquelles il faut répondre
oui ou non. Notre ruse et mon russe n'y pouvaient pas grand chose. On
remplit donc ce qu'on peut, arrivés au guichet on n'en menait pas
large avec nos copies quasiment blanches. Notre nouvelle camarade
douanière d'un air désolé nous souligne nos fautes et nous dit en
petit russe (mélange de russe pour gamin neuneu de 2 ans et d'anglais
niveau toqués) ce qu'il faut écrire et où et nous donne une seconde
chance (ratures non autorisées). On se met dans un coin et on remplit
de nouveau nos formulaires, en cochant à l'aveugle les cases comme on
nous l'avait indiqué. Puis nous refaisons la queue. A ce moment-là
plusieurs chauffeurs de bus russes essaient de nous doubler, ils
supplient la camarade douanière de les laisser passer devant nous et
elle les remet à leur place, avec cette douceur russe que nous
commençons à apprivoiser. On a encore fait quelques erreurs, elle les
corrige, très efficace elle remplit tout à notre place, nous
questionne lorsque vraiment elle en a besoin et se débrouille
parfaitement malgré notre nullité. Elle est désolée de voir Léon
fatigué (en vérité il est affamé et c'est pire), il a droit à des
sourires lui.
Puis nous revenons au camping-car, et nous nous apprêtons à vivre une
fouille en règle, ce qui ne nous est encore jamais arrivé. Mais non.
Notre première camarade douanière nous accompagne, elle nous dit de
laisser les enfants tranquillement dedans, elle jette juste un oeil
(curieux) avec les autres douaniers. Elle leur dit qu'on a 4 enfants
et leur montre notre trajet (dessiné sur le c car) et en 2 minutes
c'est fait.
Donc malgré tout, il ne nous aura fallu que 2h30 (à peine plus que
vous pour me lire) pour franchir cette frontière. Ce qui est très peu
selon notre expérience. Tout est très bien organisé et les douaniers,
malgré tout ce qu'on peut croire, très conciliants et arrangeants.
Nous apprenons juste à connaître les russes : le premier abord est
rude, peu souriant, parfois effrayant, mais en réalité, ils font tout
pour nous aider et le fond semble très sympathique et l'impression se
poursuit aujourd'hui.
DONC pour les futurs voyageurs, il semble judicieux de passer par la
Finlande si le coeur vous en dit. Et si vous voulez être aussi rusés
que nous, voire plus, nous tenons à votre disposition les documents à
remplir dont nous avons gardé quelques exemplaires, y compris de la
version corrigée avec anti-sèches.
Les kilomètres qui ont suivi ont été peu intéressants, de ces fins de
journées un peu galère où à force de chercher le bivouac idéal on
finit, épuisés, sur un parking de supermarché pourri. Le nôtre avait
au moins l'avantage d'être en banlieue de St Petersbourg alors que
nous n'avions pas prévu d'y être si tôt.
Et Russie ne saurait mentir, nous avons déjà eu notre premier contrôle
de police. En pleine nuit c'est mieux. Sans réfléchir j'ai commencé
par demander aux trois agents de parler doucement pour ne pas
réveiller les enfants (les voix russes, c'est quelque chose !). Puis
d'après Xtophe ils ont été séduits par mon magnifique pyjama
(comprendre : ils étaient morts de rire) et n'ont même pas eu le
courage de vérifier tous nos passeports. Les enfants bien sûr n'ont
rien entendu.
Le bon côté de cette fin de journée ratée, c'est que nous sommes du
coup partis tranquillement ce matin, après avoir retiré des roubles,
fait des courses (c'est folklo et long pour l'instant, comme toujours
à l'arrivée dans un pays), rempli nos réservoirs d'eau, vidé nos eaux
usées et tout ce que nous avions à vider afin de pouvoir tenir
plusieurs jours en pleine ville et que nous nous sommes installés pour
le déjeuner à Saint Petersbourg. Et là nous avons trouvé un plan de
rêve : nous sommes garés dans la rue, dans le quartier des
universités, très calme puisque c'est l'été, à deux pas du centre et
de l'Ermitage. Il y a un petit parc devant nous dans lequel les
enfants galopent et même des toilettes publiques (pour ceux qui ne
comprennent pas l'intérêt de cette info : ça peut intéresser les
voyageurs non équipés), la gardienne de l'institut devant lequel nous
sommes garde un oeil sur nous, il y a des wifis non protégés non loin,
les passants nous félicitent en voyant notre itinéraire sur le Toqcar
et nous interrogent, le rêve de tout overlander. Et même de vous tous
si vous pouviez imaginer le plaisir de voyager ainsi et de s'installer
comme des tsars au coeur d'une des plus belles villes du monde.

Nous ne comprenons pas tout, j'ai bien fait d'apprendre le russe,
d'ailleurs j'en profite pour remercier ma prof Evelyne parce que
j'épate bien ma famille, Rachel le lit déjà parfaitement,  nous ne
savons pas toujours ce que nous mangeons, nous nous étonnons de tout,
nous sommes encore aux aguets, nous discutons avec des russes charmants,
bref, c'est la vraie aventure qui commence et nous adorons ça.

11 commentaires:

  1. Passionnant...comme si on était des petites souris au fond du Toqcar!

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  2. Bon, surtout garde ton pyjama, si j'ai bien compris ! (génial, ton récit... encore !)
    Nath de B

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  3. Bravos les toqués !!!!! Vous voilà enfin en Russie !

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  4. ah la la quelle rigolade de te lire, j'imagine ta tete sans lunette et en pyj bisounours devant les flics sous vodka! un vrai bonheur ce recit c'est comme s'y on y etait!!!!
    des bisous
    anne ce

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  5. Génial TT merci pour les détails croustillants. Le papy jazzman et les faux-méchants russes, comme si on y était...
    Bises à tous des festayres qui se préparent. :)

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  6. Voilà. Vous y êtes! Et nous un peu aussi...
    La Neva, l'Ermitage, ......profitez bien!

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  7. passionnant ! je suis un peu frustrée pour la Finlande, j'aurais voulu savoir si c'set comme dans tous ces livres noirs, d'espions et de drôles de policiers.

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  8. J'adore la passage du plan galère de fin de journée ou on finit sur le parking du supermarché.... c'est du vécu chez nous aussi....
    Au passage, Ximun : on essaye de se retrouver aux FdB, je les fais samedi....

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  9. Je voudrais une photo du pyjama. Je t'imagine trop bien en train de demander du silence pour ne pas réveiller les enfants.

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  10. Superbe début d'odyssée ! Et quel talent de conteuse, on s'y croirait !! (je n'aurais pas craché sur une photo du pyjama ;)) Bonne suite de route les Toqués !
    Serjokébec

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