Thérèse se réserve de vous faire partager les péripéties mécaniques,c'est son domaine de surcompétence, alors le tâcheron littéraire vous fait patienter avec quelques impressions de voyage. Khiva c'est une enceinte de terre, de paille, de sable armée de bois, continue et monumentale, au sommet crénelé et percée de minuscules meurtrières. Depuis le V°siècle elle est renforcée par la succession des khans qui ont soumis la ville à leurs gouvernements impitoyables et leurs ennemis aux pires façons de mourir. Khiva ville de voleurs, détrousseurs de caravanes, marchands d'esclaves. Au début du 18° siècle une armée Russe se présente aux portes. Les soldats sont accueillis dans les familles au premier soir. Et trucidés tous dans la nuit, la peau de leur chef tendue sur des tambours. Au début du 19° siècle, une armée Russe encore plus nombreuse s'approche, en hiver, dans désert du Kiryl Kum. Les loups se chargeront des chameaux, le froid et la neige des hommes. Pas un n'atteindra la ville. Vous dire que nous n'en menions pas large après avoir vaincu les difficultés d'un chemin cahotique et avec la certitude d'être les seuls occidentaux dans cette ville où si longtemps ils alimentèrent le marché aux esclaves. Les temps ont bien changé! Les Khivatars de nos jours sont paisibles, accueillants, proposent leur aide à l'étranger dans l'embarras. Bien sûr il faut chercher pour trouver un restau ouvert. Notre meilleure cantine est une vaste maison de thé où les locaux plutôt séparés entre hommes et femmes consomment la succulente soupe de viande pâtes et patates, arrosée de Vodka. La Vodka (Ouzbèque) c'est le vin rouge du travailleur, le carburant des jours pénibles, le remontant de tous les jours, le nerf de la fête et probablement le fléau national. XTO refuse toujours de partager un verre car c'est l'engrenage obligatoire: les chrétiens ne boivent pas d'alcool dit-il en guise d'excuses. Ce soir nous sommes invités à la table des hôteliers et on verra comment gérer... Dans Khiva on déambule avec un immense plaisir, le soleil bas et vif taillant des ombres et des flaques de lumière qui jouent avec les coupoles bleues, les ballons comme dit Léon chaque fois qu l'une d'entre elles se dévoile à la tourne d'une ruelle. Des moments magiques: la ballade sur le contrefort des remparts, d'où l'on surveille la ville en conterbas et la campagne par les meurtrières. Le retour de la maison d'hôtes qui nous a servi un soir un bon repas familial (panne de chauffage, hélas, mais on nous a fourni les petits chaussons vendus par la maison), à la nuit noire, sous un ciel que Simon apprécierait, Saturne et Jupiter encadrant un fin croissant de lune islamique, sous les minarets faiblement éclairés, seuls dans le dédale, heureux et frigorifiés. Vous dire encore qu'ici tout n'est pas aussi rénové et muséifié qu'à Boukhara, que les habitants revivent dans la citadelle, qu'il suffit de s'écarter de deux ruelles pour trouver des enfants jouant au foot, des fours où l'on cuit le pain en grands disques croustillants et parfois décorés de dessins dans la crôute. Qu'ici comme partout, les plaques d'égouts ont été dérobées et que la marche de nuit est périlleuse, que les hommes crachent tout le temps comme à la génération des anciens poilus (l'hypérite, j'en ai connu un). Que les odeurs de brochettes sont pour nous comme l'appel du Muezzin. Que nous resterions bien encore quelque temps avec nos petits enfants, que c'est sûr cette fois, je laisse la place à la titulaire.
merci Bernard pour les récits et pour toutes les photos que Marie et toi avaient prises. Ça me fait voir que malgré les ennuis mécaniques, tout le monde est en forme et heureux d'être ensemble. Bisous à tous
RépondreSupprimerMerci papa pour ces super descriptions, on s'y croirait. Profitez bien de cette fin de séjour. bisous à tous et à bientôt.
RépondreSupprimerPs : on jurerait que tu y prends goût. à quand le Beñat's blog?